Le Livre. Depuis l’arrivée aux commandes de Vladimir Poutine, il y a dix-huit ans, la consolidation du pouvoir entre les mains du Kremlin porte un nom, « la verticale du pouvoir » – un terme, « verticale », que le président russe, candidat à un nouveau mandat de six ans, avait lui-même employé lors de sa première adresse à la nation, en juillet 2000. Il désignait alors la reprise en main du pays, et sa traduction rapide avec la mise au pas des médias et l’exclusion du paysage politique d’oligarques milliardaires qui pensaient pouvoir jouer un rôle.
Au fil des années, cette « verticale » s’est structurée, écartant sans ménagement les faibles et les indociles, pour ne laisser place qu’à une poignée de fidèles, le dernier ami ukrainien Viktor Medvedtchouk, le féroce Igor Setchine, l’indispensable Dmitri Peskov, le stratège Viatcheslav Volodine, le samouraï Vladislav Sourkov, le fantassin Sergueï Choïgou, l’hermétique Nikolaï Patrouchev ou le mondain Igor Chouvalov… Tous, membres du gouvernement, de l’administration présidentielle ou puissants patrons, jouent un rôle-clé à la cour du Kremlin et c’est à cette plongée passionnante que nous invite Mikhail Zygar dans son essai sur les « poutiniens ». Le journaliste russe confirmé s’est attaché aux pas de ceux qui forment la garde rapprochée de Vladimir Poutine en leur prêtant, sur la base de nombreux entretiens, un rôle bien plus important qu’il n’est coutume de lire. « Les membres de son cercle l’ont choisi, poussé en avant, ne cessant jamais de jouer sur ses peurs et ses désirs, pour lui faire acquérir un statut qui a dépassé toutes leurs attentes, écrit-il. Toutes les décisions sont prises (…) par Poutine, mais Poutine n’est pas une seule personne. Il est un esprit gigantesquement pluriel. Des dizaines, peut-être des centaines de personnes essaient chaque jour d’imaginer quelles sont les décisions qu’[il] doit prendre. »